Emploi de la fortune.

  1. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon ; retenez bien ceci, vous que l'amour de l'or domine, vous qui vendriez votre âme pour posséder des trésors, parce qu'ils peuvent vous élever au-dessus des autres hommes et vous donner les jouissances des passions ; non, vous ne pouvez servir Dieu et Mammon ! Si donc vous sentez votre âme dominée par les convoitises de la chair, hâtez-vous de secouer le joug qui vous accable, car Dieu, juste et sévère, vous dira : Qu'as-tu fait, économe infidèle, des biens que je t'avais confiés ? Ce puissant mobile des bonnes oeuvres, tu ne l'as fait servir qu'à ta satisfaction personnelle.

Quel est donc le meilleur emploi de la fortune ? cherchez dans ces paroles : «Aimez-vous les uns les autres,» la solution de ce problème ; là est le secret
de bien employer ses richesses. Celui qui est animé de l'amour du prochain a sa ligne de conduite toute tracée ; l'emploi qui plaît à Dieu, c'est la charité ;
non pas cette charité froide et égoïste qui consiste à répandre autour de soi le superflu d'une existence dorée, mais cette charité pleine d'amour qui
cherche le malheur, qui le relève sans l'humilier. Riche, donne de ton superflu ; fais mieux : donne un peu de ton nécessaire, car ton nécessaire est encore
du superflu, mais donne avec sagesse. Ne repousse pas la plainte de peur d'être trompé, mais va à la source du mal ; soulage d'abord, informe-toi ensuite,
et vois si le travail, les conseils, l'affection même ne seront pas plus efficaces que ton aumône. Répands autour de toi, avec l'aisance, l'amour de Dieu,
l'amour du travail, l'amour du prochain. Place tes richesses sur un fonds qui ne te manquera jamais et te rapportera de gros intérêts : les bonnes oeuvres.
La richesse de l'intelligence doit te servir comme celle de l'or ; répands autour de toi les trésors de l'instruction ; répands sur tes frères les trésors
de ton amour, et ils fructifieront. (CHEVERUS. Bordeaux, 1861.)